Sécurité : la base de tous nos apprentissages

Quand on parle d’apprentissage, on pense souvent à l’école ou aux nouvelles compétences que nous voulons acquérir. Mais avant tout cela, il existe une condition essentielle, souvent oubliée : la sécurité.

Nous avons tendance à nous voir uniquement comme des êtres “évolués”, capables de raisonnement et de langage. Pourtant, il ne faut pas oublier que nous sommes aussi des animaux. Et comme tous les animaux, nous avons besoin de sécurité pour vivre, grandir, apprendre… mais aussi pour accomplir les fonctions les plus essentielles : chercher de la nourriture, se reproduire, chasser ou explorer son environnement.

Sans sécurité, impossible d’apprendre.

Les réflexes archaïques : des gardiens de la survie

Dès la naissance (et même in utero), le bébé est équipé de réflexes archaïques. Ce sont des mouvements automatiques, programmés dans le système nerveux, qui assurent la survie et la protection du petit humain.

🔹 Le réflexe de Moro

Appelé aussi réflexe de sursaut, il se déclenche face à un bruit soudain, un changement de position ou une sensation de chute. Le bébé ouvre grand les bras, inspire et parfois pleure. Ce réflexe prépare à alerter le système : « Danger potentiel ! ». Chez l’adulte, il peut rester actif sous forme d’hypersensibilité au stress ou de réactions disproportionnées.

🔹 Le réflexe de protection des bras et du tronc

Il permet au bébé de protéger sa tête et son corps, d’amortir une chute. Il joue un rôle de bouclier automatique.

🔹 Le réflexe tendineux de protection au niveau des mollets

Ce réflexe fait appel aux réactions instinctives animales de survie :

  • la fuite : préparer les jambes à courir pour s’éloigner du danger,
  • le figement : bloquer le corps, se raidir pour se protéger ou se rendre moins visible,
  • parfois même la lutte : s’ancrer fermement pour résister.

Lorsqu’il n’est pas bien intégré, ce réflexe peut laisser des traces chez l’enfant ou l’adulte :

  • instabilité en position debout,
  • marche sur la pointe des pieds ou jambes tendues,
  • vigilance corporelle excessive, comme si le système restait prêt à réagir au danger,
  • difficulté à se détendre et à entrer en confiance.

Ce réflexe illustre parfaitement le lien entre sécurité physique et sécurité psychique : si le corps reste prêt à fuir ou à se figer, le cerveau ne peut pas se libérer pour apprendre sereinement.

Sécurité et apprentissage : un duo indissociable

Le cerveau humain fonctionne selon une hiérarchie simple :

  1. Survivre d’abord.
  2. Apprendre ensuite.

Si l’enfant (ou l’adulte) se sent en insécurité – que ce soit par peur de l’échec, par une ambiance stressante, ou par un manque de repères – son système nerveux va rester en alerte. Or, un cerveau en mode “alerte” ne peut pas entrer pleinement dans le mode “apprentissage”.

 

Astuces et rituels pour renforcer la sécurité

Quelques clés simples pour tous :

  • Le rituel d’accueil : que ce soit à la maison ou en classe, prendre quelques minutes pour dire bonjour, se regarder dans les yeux, donner une accolade ou un sourire. Le lien humain sécurise immédiatement.
  • La respiration calme : inviter l’enfant (ou l’adulte) à poser une main sur son ventre et souffler profondément, comme pour “gonfler un ballon”. Cela apaise le système nerveux.
  • Les pressions profondes : un câlin appuyé, un massage doux, ou simplement envelopper son enfant dans une couverture. Ces stimulations donnent au corps la sensation d’être contenu et rassuré.
  • Créer un environnement prévisible : annoncer les transitions (“dans 5 minutes, on va ranger…”), utiliser des routines. Le cerveau aime savoir à quoi s’attendre.
  • Bouger pour se sentir en sécurité : marcher, sauter, se balancer…user des mouvements croisés dont je parle tant !!! Ces mouvements réveillent les réflexes archaïques et permettent au système nerveux de retrouver son équilibre.

Pour les parents :

À la maison, l’enfant a besoin d’un cadre à la fois sécurisant et souple. Quelques idées :

  • Créer un rituel du matin et du soir (chanson, câlin, moment calme) qui installe une base sécurisante pour la journée ou la nuit.
  • Utiliser un coin cocon : un espace avec coussins, couverture, doudous, où l’enfant peut se retirer pour retrouver son calme.
  • Proposer des jeux moteurs : ces expériences stimulent les réflexes archaïques de protection.
  • Nommer les émotions : mettre des mots sur ce que l’enfant ressent renforce la sécurité intérieure.

Pour les professionnels (crèche, nourrice, enseignants) :

Dans un cadre collectif, la sécurité affective et corporelle est primordiale. Quelques pistes :

  • Accueil individualisé et adapté : prendre le temps de nommer l’enfant, de lui adresser un sourire ou un mot personnalisé.
  • Repères visuels et sonores : affichages clairs, chansons rituelles pour marquer les transitions (rangement, repas, sieste, cantine et récréation pour les plus grands).
  • Moments de regroupement : cercle du matin, histoire partagée, qui renforcent le sentiment d’appartenance au groupe.
  • Activités sensorielles : pour stimuler le corps et apaiser le système nerveux.
  • Mouvements régulés : danse, parcours moteur, jeux d’équilibre, mouvements croisés…

En conclusion

La sécurité est une condition fondamentale. Comme tous les animaux, nous ne pouvons explorer, apprendre, aimer ou créer que lorsque nous savons que nous ne sommes pas en danger.

On peut comparer cela à l’image du papa lion dans Le Roi Lion : Mufasa montre à Simba les limites du territoire, l’endroit où il est en sécurité, et celui où il ne doit pas aller, comme le cimetière des éléphants.

Ces repères clairs n’enferment pas l’enfant, au contraire : ils lui donnent la confiance nécessaire pour explorer le monde à l’intérieur d’un cadre protecteur.

En prenant soin de ces petits rituels de sécurité, nous donnons au cerveau – et au cœur – la permission de s’ouvrir à l’apprentissage.

Parents, professionnels de la petite enfance, enseignants : vous êtes des passeurs de sécurité.
Chaque rituel, chaque regard bienveillant, chaque geste corporel posé avec douceur aide le système nerveux à passer du mode “survie” au mode “apprentissage”.

Parce qu’un enfant (ou un adulte) qui se sent sécurisé est un enfant (ou un adulte) qui peut grandir, s’épanouir et apprendre.

 

Laisser un commentaire